Résidence de recherche et de création (du 1er avril au 31mai 2025)

Exposition avec le Collectif BIENVENUE

Les SHEDS Pantin
Du 7 au 28 juin 2025

L’EXPOSITION


Cœurs Queen Size est une exposition qui explore la chambre comme un lieu intime, un espace à soi, un refuge propice aux rêveries et aux projections.
La constitution d’un collectif d’artistes est pour BIENVENUE une réponse à l’importance de créer des espaces de réflexion et de création. À l’instar des chambres adolescentes, qui amassent nos récits, nos désirs et affichent nos fiertés et nos souvenirs, la chambre est un des vecteurs de nos identités.

Les céramiques de Margot donnent à voir de nouveaux symboles emblématiques et de nouvelles icônes : les doigts et cœurs s’entremêlent et les étoiles enfantines se parent de visages grinçants. Richard compose le tableau d’une vie rêvée d’un personnage à son réveil, ainsi qu’une installation textile en souvenir d’une vie passée en hommage à sa grand-mère. À travers son miroir en lambeaux serti de perles et son costume hybride de fourrure et de velours, Lucas imagine ses mues et celles de ses ami·es, questionnant ces identités multiples. Louise-Margot présente un ensemble de sculptures oniriques en résine et silicone, inspirées des décors domestiques de son enfance, évoquant la fragilité de la mémoire et des
relations.

De grands rideaux serpentent dans l’espace, créant des alcôves intimistes où les œuvres se rassemblent. Les tissus satinés renvoient à ce que l’on préserve précieusement comme le coffret à bijoux, la boîte à musique ou encore l’écrin mortuaire. Cette proposition scénographique invite le·la spectateur·ice à déambuler afin de découvrir les œuvres au fil de son parcours. Pendant le temps de l’exposition – fruit de la résidence -, des visites, des ateliers, et une soirée de performances et de musique live sont proposés à un public de tout âge.

Soirée performances et musique live le 20 juin 2025 avec
OPALE MIRMAN, LUCAS TORTOLANO
ARMELLE RABATÉ & CALYPSO PETROU
SAM CLAUDE, ALMOND BUTYL

Chèr·es visiteur·euses,

Avez-vous passé une bonne nuit ? J’espère que vous vous êtes bien reposé·e·s.

J’ai le plaisir de vous accueillir, par mes mots, dans l’exposition Cœurs Queen Size du collectif Bienvenue. Quelques jours avant vous, j’ai moi-même été invitée aux Sheds par Margot Darvogne, Louise-Margot Décombas, Richard Otparlic et Lucas Tortolano. L’espace dans lequel vous entrez n’était alors qu’un atelier où les artistes travaillaient encore à la création des œuvres que vous découvrez aujourd’hui.

L’exposition que vous voyez, je l’ai d’abord imaginée. Les yeux encore embrumés du sommeil de la veille, j’aimerais en discuter avec vous, comme on partage le souvenir flou d’un rêve à un·e colocataire encore à moitié endormi·e.

Est-ce que vous vous y sentez bien ? C’est une question importante. Pour le collectif Bienvenue, l’atmosphère qui règne dans l’espace est un enjeu essentiel — que ce soit à travers une scénographie pensée pour être enveloppante, ou par le sentiment d’amitié profonde qui imprègne l’ensemble de leur démarche artistique. La curation articule ces deux intentions : rompre avec la froideur souvent impersonnelle des espaces d’exposition, et affirmer le plaisir du travail collectif, nourri par un dialogue constant entre les un·es et les autres.

Moi, je m’imagine y être plutôt à l’aise, réconfortée par les couleurs chaleureuses et par toutes les matières qui donnent envie d’être caressées. J’aimerais me blottir contre le pelage des créatures de Lucas Tortolano ou encore jouer sur le lit en silicone de Louise-Margot Décombas. Ma chambre rêvée d’enfant.

Vous déambulez ici entre trois espaces distincts, trois chambres aux ambiances complémentaires : un espace rose, traversé par les souvenirs et la mémoire ; un espace bleu ciel, empreint de douceur et d’éveil ; et un espace bleu foncé, plus nocturne, propice à la rêverie et à la solitude. Toute la scénographie repose sur cette alternance de temps et de sensations.

Est-ce que vous vous sentez comme chez vous ? Je sais, cette question est moins évidente.
On ressent une tension entre ce qui nous paraît familier et ce qui s’éloigne pourtant du réel. La plupart des formes s’inspirent des objets que l’on retrouve chez soi : portail, miroir, lampe, lit et coussins. Mais ce mobilier n’a pourtant rien de commun. Leurs designs hors normes racontent le lien affectif que chacun·e des artistes entretient avec l’espace domestique. Le choix des textiles autant que celui des symboles vient témoigner d’histoires intimes, souvent familiales.

Certains de ces motifs me rappellent des souvenirs adolescents — comme la pluie de cœurs du portail de Margot Darvogne, que j’aimais dessiner sur mes carnets. Ou encore le petit déjeuner rêvé de Richard Otparlic, que l’on partage avec un·e amant·e après une nuit d’amour.

Vous voyez-vous vivre dans ces chambres ? La question peut sembler déroutante. L’apparente chaleur et familiarité des lieux se révèle, à y regarder de plus près, bien plus troublante. La chambre — espace intime, refuge du repos — laisse transparaître une forme d’inquiétude. À la manière du monstre sous le lit, qui d’abord terrifie puis devient une présence avec laquelle on apprend à cohabiter, une ambiguïté s’installe.

On se surprend à remarquer comment les œuvres dialoguent en silence, se répondent parfois sur un ton grinçant. Les céramiques de Margot Darvogne, avec leurs doigts crochus, semblent presque guetter les costumes de Lucas Tortolano, dont les regards brodés nous fixent avec insistance. La lumière vacillante des pièces de Louise-Margot Décombas éclaire des zones d’ombre plutôt qu’elle ne rassure. Non loin, la fleur de Richard Otparlic suspend le temps, comme un souvenir qu’on n’arrive ni à garder ni à oublier.

Ensemble, ces œuvres tissent un univers familier mais troublé, où la douceur côtoie une tension sourde. On ne sait plus très bien si l’on rêve ou si quelque chose nous observe depuis l’autre côté du miroir.

Bisou, et bonne visite.
Camille Martin

LA RÉSIDENCE


Pendant le temps de création (avril et mai 2025), les membres du collectif BIENVENUE ont déménagé leurs ateliers aux Sheds. Depuis leurs sorties des Beaux-Arts de Paris, c’est la première fois qu’iels se sont retrouvés à travailler de nouveau dans le même espace : cette proximité a favorisé une réelle porosité de leur travail plastique et les échanges avec l’équipe des Sheds autour de l’exposition.
Portées par l’invitation à cette résidence, leurs recherches et expérimentations ont convergé vers une réflexion commune autour de la chambre comme espace intime, envisagée comme un refuge de leurs désirs et de leurs souvenirs, lieu propice aux projections oniriques. Margot Darvogne, Louise-Margot Décombas, Richard Otparlic et Lucas Tortolano ont réalisé chacun.e de nouvelles œuvres évoluant autour de ces notions.
Plusieurs temps d’ouverture au public se déroulent depuis le 15 mai afin d’échanger avec les habitant·es et visiteur·euses autour du collectif, de leurs pratiques respectives et du processus de création.